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10 octobre 2010

Alain Bashung - Variations sur Marilou (Gainsbourg cover)

L’ Homme à tête de chou
Paroles et musiques Serge Gainsbourg - Interprétation Alain Bashung - Chorégraphie Jean-Claude Gallotta - Centre Chorégraphique national de Grenoble





« Avec son regard absent et son iris absinthe », la petite garce shampouineuse Marilou rend « fou et à moitié coucou » un type aux grandes oreilles, « moitié légume moitié mec », lequel finira par la faire disparaître sous la mousse, à coups d’extincteur. L’Homme à tête de chou est un album-concept écrit en 1976 par Serge Gainsbourg au sommet de son art, de son humour, de son jeu avec la langue, de sa dérision, dans une liberté et une invention musicale époustouflantes. Alain Bashung, qui vient de « s’en aller faire un tour de l’autre côté » en emmenant avec lui une part de nous-mêmes, était de la même famille musicale, celle de l’élégance morale, de l’exigence artistique, de l’ironie un peu désespérée, oscillant de la même façon entre gravité et légèreté. D’ailleurs, tous deux se sont retrouvés ensemble pour concevoir un album, Play blessures, en 1982, où ils cultivaient leur côté noir, sans complaisances avec la mode musicale de l’époque. Grâce aux liens forts que la MC2 a tissé depuis des années avec Bashung (il y a donné un concert de légende lors de la réouverture en 2004, il est venu notamment y répéter et créer un autre de ses concerts), une connivence artistique put s’établir avec Jean-Claude Gallotta. De ces rencontres naquit un projet pour lequel Bashung enregistra l’Homme à tête de chou en prolongeant les trente-deux minutes de chansons de Gainsbourg jusqu’à en faire une continuité d’une heure dix avec des parties musicales destinées à lier les tableaux entre eux. « Il le fit magnifiquement, dit Jean-Claude Gallotta, sa voix était en pleine puissance, et en pleine intériorité. C’est comme s’il l’avait répété toute sa vie. » Jean-Claude Gallotta aime « tremper » sa danse dans d’autres univers. Il l’a fait aussi bien avec la chanson rock, le jazz, la musique khmer, avec Bach, Kurt Weill, Janacek, avec Pascal Dusapin aussi, et il y a quelques mois encore avec Lully. Avec Gainsbourg et Bashung, il retrouve ses idoles d’adolescent par lesquels il a découvert la musique. En douze tableaux et avec quatorze danseurs, sous le regard des deux maîtres, mais « leur absence en héritage », Jean-Claude Gallotta se propose de fondre leurs univers, de traiter chorégraphiquement le dépouillement, la violence, le désir, « qu’on perçoive quelque chose, dit-il, de la douleur latente qui parcourait ces deux artistes en même temps que leur formidable énergie ». Paul Valéry parlait de la poésie en disant qu’elle était « une longue hésitation entre le son et le sens ». Gainsbourg et Bashung cherchaient cet équilibre-là. « La danse, dit Jean-Claude Gallotta, est aussi une longue hésitation, entre le geste et le sens ». L’Homme à tête de chou voudra avant tout rendre compte d’une atmosphère, « façon music-hall sans les paillettes », ou alors des paillettes qui reflètent aussi bien l’angoisse d’être vivant que la jouissance de l’être encore.






Après ce spectacle, que nous avons vu samedi 14 novembre 2009, un drôle de gout dans la tête qui redescend dans la bouche :
La chorégraphie était du pur Gallotta : sans grandes trouvailles, mais agréable.
J’ai adoré la chaise de bureau vide, fil rouge du spectacle, qui par sa vacuité exprimait magnifiquement l’absence et le deuil.
Sur « variation sur Marilou », j’ai aimé les trois couples qui exécutent successivement et exactement la même chose avec chaque fois de moins en moins de vêtements. La dernière demoiselle n’a pas attendu demain pour enlever le bas …
L’absence de décor passait bien.
Avec Bilbo, l’apparition d’une Iggy Popette, culotte sur les pieds, et Telecaster rouge, comme seul cache-sexe, nous a beaucoup amusés.
Le seul point vraiment négatif vient peut être de l’interprétation du « livret gainsbourien » par Bashung. Trop récité pas assez raconté, pas assez susurré. Gainsbourg vivait l’Homme à Tête de Chou. Bashung nous postillonne pour ne pas dire "bredouille", dès le début, un Homme à LA Tête de chou. Les arrangements musicaux enlevant encore au « voyage dans la tête », par leurs cotés brutasses et peu psychédéliques.
Les calbutes kangourous blancs, qui ressortent quand même à la fin, m’ont replongé à la grande époque. Celle où Gallotta, en 1980-85, prenait son essor et qui préfigurait mon premier internement en cette blanche clinique neuropsychiatrique.